Deuxième volet de cette histoire. La restauration des espagnolettes continue, en bronze, avec un modèle plus propre et plus précis, mettant en relief les détails de la couronne de marquis qui orne la poignée.
Le travail sur modèle, à l’opposition de la création consiste fabriquer une pièce suivant un plan ou un modèle existant fournis par le client.
Sur un design original de Guillaume Ramillien, architecte :
http://www.guillaumeramillien.fr/
Process standard de moulage sable sur modèle en impression 3D.
Une bonne partie de la production:
Poli miroir.
Tout le projet sur http://www.architecturedudesir.fr/
Les Arts et Métiers sont pétris de traditions… l’une d’entre elles consiste pour la promotion quittant l’Ecole à réaliser une clef ouvragée, à taille humaine, fruit du travail de toute la « Prom’s ». C’est la Clef d’Ex. Elle symbolise la clef de l’Ecole transmise à la promotion suivante qui en prend ainsi la responsabilité, ainsi que celle de transmettre les Traditions.
Voici la clef réalisée par ma promotion
Un bon résumé de cette tradition est disponible ici.
Une autre tradition, dérivée de cette première, consiste à fabriquer des miniatures de la Clef d’Ex pour chaque membre de la Prom’s. Ainsi chacun peut emporter avec lui le souvenir matérialisé des bons moments passés ensemble à « usiner » la Clef. Après le pourquoi, le comment :
Ca commence par une définition 3D et une impression de même dimension. Comme souvent, c’est Guillaume et Jérome qui gèrent. Format pendentif, grande longueur = 80mm
Avant toute chose, afin de valider la faisabilité de la chose et le bon dessein du modèle, on procède à un moulage et une coulée proto.
Le châssis n’étant pas pourvu de moyen de guidage, j’utilise la techniques des faux goujons. Cela consiste à prendre dans la masse de sable des pièces mâles et femelles qui vont aider à remmouler le moule avec précision. Le mauvais calage entre le dessus et le dessous lors de la fermeture (remmoulage) s’appel la « variation » C’est un défaut souvent rédhibitoire. Dans notre cas la pièce est entièrement dans le moule du dessous, donc pas de variation possible. Il faut cependant que la descente de coulée arrive au bon emplacement. Le proto est bien sortie, maintenant la série.
Nous sommes en petite série, d’une pièce nécessitant un haut niveau de précision mais de moulage simple. Nous adoptons le procédé moulage sable, avec plaque modèle.
La plaque de gauche est constituée de 6 impressions de la clef disposées autour d’un chenal central. Elle permettra de fabriquer le moule du dessous. En effet les meilleurs détails s’obtiennent dans les empreintes inférieures car d’une part les crasses du métal ont tendance à surnager et donc à se retrouver en plafond de moule; d’autre part la pression métalostatique est plus importante ce qui aide le métal a épouser les détails. C’est particulièrement vrai dans le cas de l’aluminium qui a une grande tension superficielle. La plaque de gauche sert à fabriquer le dessus constitué du chenal, du pied de coulée et de l’emplacement des évents. Les plaques sont pourvues de broches de guidage qui permettent un démoulage sans casse.
Avec ce système on fabrique un moule en 20min ce qui nous a permis de couler 126 clefs en une journée avec seulement deux rebuts! Cependant certaines ont demandé un peu d’ébavurage, et pour ça Jérome mérite bien sa Médaille car c’est lui qui s’est collé à la tâche.
Merci à mes deux compères de fonderie pour ce projet piston.
Les ingénieurs Matériaux ne le répètent jamais assez : 80% des ruptures d’un matériau en service sont dues à la fatigue. La fatigue c’est quoi ? C’est lorsque qu’une pièce est soumise à une sollicitation périodique et inférieure à sa contrainte maximale admissible. Pour faire simple : tirez une fois sur la poignée, elle tient le coup, tirez 10000 fois… Cette pauvre espagnolette en a fait les frais :
espagnolette dans sa fausse partie en sable – la partie cassée est en hautJe commence à l’aide d’argile par reconstituer la forme de la partie cassée, directement sur la pièce:
Sur les prises de vue suivantes la réparation n’est pas présente, il s’agit en fait de différents moulages, pour celui-ci, j’ai directement taillé dans le sable l’empreinte de la partie à reconstituer. Les deux techniques se valent.
On attaque la partie moulage à proprement parler. La géométrie de la pièce nécessite une fausse partie car le plan de joint est gauche. De plus la pièce ne démoule pas, j’utilise donc un noyau de paroi, aussi nommé « motte battue »
Je moule ensuite ce qui deviendra le dessous.
Il ne reste plus qu’à mouler le dessus, et remmouler la motte battue dans le dessous. On taille le système de coulée et après c’est un peu toujours la même histoire.
La pièce originale, issue d’un château de marquis (d’où la couronne) du XVIIIème, était en fonte. Pour le proto, je coule la pièce en AlSi7Mg03, un alliage d’aluminium qui atteint de bonnes propriétés mécaniques après traitement thermique.
Il ne reste plus qu’à usiner l’alésage dans la partie restaurée. La suite? L’achat d’un creuset en SiC (carbure de silicium) devrait me permettre de couler de la fonte, si toutefois le four monte assez haut en température… suspens. En attendant, l’usage montrera si l’alliage d’aluminium tient la route.
Au commencement était le plan
Il s’agit d’une pièce assez simple car le client souhaite qu’elle soit entièrement reprise en usinage. La demie-coupe de droite montre la pièce brute, celle de gauche l’usinée. C’est une pièce de révolution.
Si vous n’êtes pas familier des techniques de moulage, il vaut mieux commencer ici.
Les mouleurs ont souvent à travailler les pièces de révolution : diverses poulies, roues, bandages… mais les plus symboliques de toutes sont les canons et les cloches. Par ailleurs, les mouleurs sont généralement des gens économes, particulièrement de leur temps. Comme me l’a dit un jour un chef d’atelier pour le compte duquel je devais améliorer un process de production « va voire les feignants, ce sont eux qui ont les meilleures idées ». Pour réaliser un moule de révolution, l’idée est de ne pas s’embarrasser d’un modèle. On pratique le moulage au trousseau.
Prenez un châssis, un arbre et une crapaudine. Attention, une crapaudine n’est pas une espèce de batracien femelle mais une pièce qui assure une liaison pivot entre un arbre vertical et le sol.On sert le sable dans le châssis.
Jusqu’en haut, puis on règle le tout.
On installe la planche a trousser sur l’arbre et c’est parti pour un tour, deux tours…
Un dessein vaut mieux qu’un long discours. Voici l’empreinte dans le châssis inférieur, le châssis supérieur est moulé à part et ne contient que des évents et la descente de coulée. Je crée un joint en entaillant la périphérie du plan de joint du demi moule inférieur. La collerette de sable relevé va, en s’écrasant au moment du remmoulage, assurer l’étanchéité.
Le travail du mouleur est terminé, voici que rentre en scène le fondeur… 5 secondes pour couler, 30min de refroidissement (par-ce-que l’on est toujours trop pressé de voire le résultat) et voilà:
Après la production d’une série de clefs décoratives, la fonderie revient dans le « fonctionnel ». Le propriétaire ayant écumé plusieurs serruriers, il se trouve que cette clef n’existe plus dans les catalogues d’ébauches. Alors le plus simple reste donc d’en faire un surmoulage :
… d’un sécateur dont le contre-fer a rendu l’âme.

Un petit moulage avec absence de dépouille et plan de joint gauche.


La plupart du temps en moulage sable, le plan de joint est horizontal. Cependant il arrive aussi que le fondeur ait envie de voir les choses sous un autre angle…
Les pièces d’aujourd’hui sont un lot de 12 « picots » qui vont intégrer le cadran d’une grande horloge. C’est une pièce avec un plan de symétrie, elle comporte une forme cylindrique prolongée par un cône qui constituent la partie visible de la pièce, celle qui va marquer les 12 segments de l’horloge. La partie plane sera noyée dans l’anneau externe qui formera le cadran.
En quelques photos, le process :
Demis-modèles des pièces et du chenal dans le châssis Premier demi-moule, et ses repères de remmoulageMes châssis verticaux n’ont pas de broches. Pour guider le remmoulage j’utilise une technique d’Ancien : les repères. On taille des cônes dans le premier demi moule et lorsque l’on serre par dessus le second, se crée naturellement leurs positifs. Le tout s’imbrique parfaitement. Si le sable est bien serré, et les moules pas trop grand, cette méthode est très précise et limite la « variation ».
Les puristes critiquerons la « coulée en chute ». Les empreintes sont remplies par le haut ce qui augmente les turbulences du métal lors de la coulée. Les alliages d’aluminium sont fortement oxydables à l’état liquide, on préfère donc les remplissages garantissant peu de turbulences : en source (empreinte remplies par le bas). Sinon le risque est de former et d’emprisonner des peaux d’alumine dans le métal, ce qui le fragilisera. Aujourd’hui les pièces ne voient pas de chargement mécanique… et le rendu visuel n’a pas l’air d’avoir eu à pâtir de la coulée en chute :
ABehot SAS – société au capital de 5000€ – SIRET 83076594700015
publication : Alexandre Behot – hébergement: OVH